Y a rien de plus terrible qu’un samedi après-midi ensoleillé où t’as rien à faire. C’est que les premières semaines de septembre et ça s’annonce déjà mal quoi. J’aimerais pouvoir appeler Dexter pour lui dire des conneries et qu’on se retrouve quelque part pour dire encore plus de conneries face à face. Ou je sais pas, n’importe. Mais il m’a envoyé un message pour me dire qu’il passe l’aprem avec ses potes, ok génial. Je lui ai déjà fais une crise y a pas longtemps, si je le fais chier encore j’ai peur qu’il m’en veuille vraiment, donc… Voilà la situation.
Voilà pourquoi je marche d’un pas énervé dans le bahut, en tirant surement une gueule super horrible parce que tous ceux qui me croisent se poussent pour ne pas être dans mon chemin. C’est gentil tiens, ça m’empêche de leur crier de dégager. Toujours bien d’économiser son énergie.
Mais je ne fais que marcher, du coup. Tout en m’ennuyant. Je me dis que ce serait bien de causer à Aniela, elle est toujours de bonne humeur elle, tellement que ça fini toujours par déteindre sur toi. Mais je peux pas faire ça. Je l’ignore trop pour faire ça. Elle va surement me trouver trop saoulante et pas compréhensible et égoïste si je fais ça.
J’ai trop de problèmes, c’est terrible.
C’est donc tout à fait plausible de me retrouver là. Encore à l’intérieur mais presque dehors. À plus qu’une porte vitrée de sortir dans le jardin. Là où il y a tellement de soleil que j’y suis pas encore mais mes yeux sont déjà plissés. Là où les étudiants viennent se relaxer. Là où il y a décidément trop de fleurs pour que ce soit bon pour la santé. Sauf pour Aniela, surement. Mais c’est pas le moment de parler d’elle. Ce paysage est juste là pour vous faire souffrir de la rétine.
Je pousse la porte et me souviens pourquoi le soleil est mon pire ennemi. Sérieusement, pourquoi il existe? Je crois savoir qu’il est utile pour plein de choses mais personnellement je m’en fous. Aujourd’hui, je sens là qu’il est juste là pour me cramer les cheveux et m’énerver au point de vouloir devenir astronaute et monter dans une fusée pour arriver jusqu’à lui et lui jeter une bombe à la gueule.
C’était dans ces pensées de pure vengeance contre cet ennemi redoutable, aveuglé par lui au point de devoir avancer les yeux fermés pour pas devenir aveugle, que je me suis retrouvée à écraser quelque chose de tout à fait suspect. À la seconde où j’ai pigé que la chose suspecte était vivante - au bruit que ça a fait au contact de ma chaussure compensée - j’ai juste légèrement flippée ma vie et me suis par la même occasion étalée par terre.
Juste.
La meilleure journée de ma vie.
Urh.
Pour ma défense: je dois être le plus délicate possible quand je touche quelque chose de vivant. Alors, au son de sa voix grave j’en ai déduis que c’était un être humain de sexe masculin et tout ça on s’en fout parce que tout ce qui compte c’est que j’ai eu peur d’écraser le crâne d’un être humain et d’avoir sa cervelle à essuyer de mes godasses.
Ce qui nous amène à moi par terre la tête dans l’herbe. Passablement énervée. Je suis presque sure de m’entendre murmurer ‘tu te fous de ma gueule’ de façon tout à fait poli.
J’ai plein de mes mèches noires étalées dans tous les sens, à cause de cette mésaventure, sur mon visage. Quand je me tourne vers le grand gaillard qui n’a même pas le crâne abimé puisque j’ai visiblement paniquée et levé le pied trop vite pour lui creuser une cicatrice quelque part.
Je ne raconterais pas la déception que j’ai subi.