Don : Macabre marionnettes.
Description : Dexter a le pouvoir de manipuler « à distance » les animaux morts, à la manière d’un marionnettiste. Ça semble se limiter aux petits animaux. Il n’a utilisé ce pouvoir que deux fois, par inadvertance. Depuis son entrée à Syncro, il a apprit de quelle façon déclencher ce don mais ne l'utilise quasiment pas.
Maîtrise : Encore approximative.

Tu étais né du début de l'hiver, un premier mois gelé. Tu grandis dans la banlieue Londonienne mais les murs de ta petite chambre ne sont pas assez épais pour t’abriter des cris des disputes qui font trembler la maison lorsque la porte se claque pour la cinquième fois de la soirée. La vitre de l’entrée à déjà été cassée trois fois par ces éclats de voix, tu t’en souviens encore.
Le bruit cristallin après le vacarme de la porte fermée à la volée, accentuée par le courant d’air qui fait accélérer le mouvement des charnières. Tu descends l’escalier pieds nus. Ta mère pleure dans la cuisine encore. Elle lève la tête et te vois dans l’encadrement de la porte. Elle te lance un regard plein de désespoir, sa bouche s’ouvre pour prononcer ce que tu penses être des mots de réconforts. Mais un cri. Tu as les pieds dans le verre, tu teintes le parquet de rouge. Ça n’est rien de grave mais elle t’attrape sous le bras et monte en trombe les marches pour te mener à la salle de bain. Là, elle t’y nettoie les pieds, tout en te sermonnant sur le fait que tu devrais dormir, que l’on ne descend pas pieds nus et tout ce genre de choses sur la sécurité et les horaires.

C’était un de tes rares souvenirs avant la séparation et la rencontre avec l’être qui régit maintenant ta vie. Mais tu sais que les autres moments ressemblent tous à celui-là. Jusqu’au jour de la Grande Dispute. Celle qui a balancé ton rythme de vie paisible dans le fossé et qui t’as laissé déboussolé. De celles qui séparent à jamais les familles, si l’on peut appeler ainsi la tienne. C’est la révélation du secret, la découverte incongrue que tu n’étais pas seul, que tu n’étais plus seul. Ce jour-là tu avais 7 ans et tu rencontreras demi-sœur dans quelques mois. Elle s’appelle Dragomira, elle vivait alors en Russie avec sa mère.

Le divorce se passait, ta mère haïssait cette autre famille à laquelle ton père l’avait préférée. Elle répétais en boucle des injures que tu ne comprenais pas toujours. Cette femme étais le démon, sa fille une petite garce. Et toi tu taisais tes envies de riposter car tu savais que le chagrin faisait des crevasses que seul le temps comble, bien que tu doutais que ta mère s’en remette un jour. Tu profitais juste des vacances pour rejoindre ta désormais très chère sœur, car le juge en avait décidé ainsi, et tu n’avais pas rêvé mieux. Ainsi vous vous étiez rapprochés et étiez même devenus inséparable au point de devoir procéder à des adieux déchirants lorsque les vacances prennent fin. De son côté ta mère paranoïait de plus en plus de te voir s’éloigner d’elle, refusant même de te laisser partir là-bas. Ce qui ne faisait qu’accentuer ta colère, provoquant chez toi de violentes crises de nerfs.

Puis suivit l’abandon, la renonciation. Elle te sentait lui échapper, la trahison par la chair de sa chair, à quoi bon lutter. Le déménagement se préparait, les dernières paroles d’adieu étaient prononcées et même si elle ne te pardonnait pas ta mère te laissait la quitter pour une autre femme de ta vie. Tu avais 17 ans et les retrouvailles furent des effusions de joie bien inhabituelles pour la jeune fille que tu rejoignais.
C’est à ce moment que tu découvris ton don. Enfin « don » était bien ironique. Un matin, peu après ton emménagement en Russie, vous découvrez toi et ta sœur que le poisson dans l’aquarium rond qui trône sur la table du salon est mort. Il flotte à la surface et vous le fixez l’air mi-amusé mi-dérangés. Mais la stupeur fait taire vos ricanements stupides lorsqu’après l’avoir fixé pendant un certain temps, le poisson remue légèrement. Il redescend même nager pendant quelques secondes au centre du bocal. Tu émets un rire gêné détourne le regard un instant et le poisson remonte à la surface, inerte.

C’est alors que l’on mit le doigt sur ça, ce trucs bizarre. C’était pour cela que l’on t’envoya à Syncronicity, cette école qui devait « t’apprendre à maitriser ton don ». Dans les premières années du rêve, quand enfin vous étiez tous deux réunis, il y eut Jen. La chose indolente qui s’accapara ton âme-sœur. La « meilleure amie » de Dragomira. Et malgré l’animosité que tu ressentais envers elle tu dis oui. Oui pour ce sourire radieux que ta sœur finit par afficher un jour. Oui pour l’amour de ton amour. Oui a un autre que toi-même et tu appris à ravaler ton égoïsme. Alors ces poussières d’années te permirent d’avancer un peu et d’aimer d’autres choses et d’autre gens. Et la méfiance s’effaça pour laisser se glisser entre vous l’espace du monde extérieur. Pour la première fois tu n’avais pas cru mourir en la voyant t’ignorer au profit d’un autre. Pour la première fois ta sœur s’écrasa devant l’apparition d’un être à toi. Pour te laisser aimer quelqu’un qui n’était pas elle. Première ouverture.

Mais la tranquille existence n’avait pas prévu de se poser sur vous à jamais. Il y eut l’explosion, les cris, les pleurs et la perte de Jen. Ton cœur feignit de te lâcher et la panique s’empara alors de toi ce jour là. Tu n’eu tout d’abord pas la force de crier. Puis un son inhumain sorti de ta gorge et tu te mis à courir. Qu’importent-les débris, qu’importent la douleur et la coupure sur ton crâne. Qu’importe la peur général et le marasme ambiant. La seule peur, la seule énergie qui te fit te mouvoir ce fut la peur de l’avoir perdue pour toujours. Et tu te mis à courir à contre-sens en braillant son nom si fort que tes propres tympans sifflèrent. Mais ton cœur continua de tambouriner en te hurlant de la chercher. Puis au détour d’un cri tu la vit là, baignée des larmes de tes joues. Tu n’eu le temps que de réaliser qu’elle était bel et bien là avant de t’effondrer au sol comme une masse informe pareille aux cadavres que tu réanimais parfois.

Puis il fallu tant bien que mal se remettre de ça et reprendre la vie du début, retourner dans une de ces écoles, Vurtus Insigna cette fois. Il fallut n’être plus que deux à nouveau, apprendre à faire avec les autres peu à peu et à s’aimer un peu moins pour être acceptables. Tu appris à refaire connaissance avec le monde extérieur, faire confiance à nouveau pour s’offrir aux possibles. La difficile transition de la souffrance vers la constance du quotidien, te faire à nouveau à la vie avec les autres. Seconde ouverture.

Le passage du temps efface ta mémoire et le vent de la vie s’est emparé de toi. La crainte d’un deuxième incident t’a fait bouger pour la énième fois pour au final te laisser choisir de continuer ou non. Deux semaines d’infinie paresse dans laquelle une réponse devait murir. Aller où non à Verbum Pretium, recommencer pour la troisième fois la vie mais cette fois si en Suisse.

Maman, tu as vu là l’occasion de me récupérer et j’ai pleuré cette fois. J’ai cru que c’était bel et bien fini. Et malgré le dernier couteau que je t’ai enfoncé dans le cœur je t’aime un peu. Je ne peux pas quitter Drago, ça serait un meurtre doublé d’un suicide. Tu doutes surement du bien fondé de ces sentiments mais ma décision reste la même qu’importe tes menaces et ton désespoir. J’espère que tu me comprendras mais comme toi, j’ai besoin de la seule personne qui m’aime. Tu sais quelle serai la douleur de rester ensembles à vivre cote à cote dans une haine silencieuse. Je ne peux que t’aimer de loin, maman, tu le sais bien.
Je retourne apprendre ma vie loin de toi, pardonne moi et apprends à aimer plutôt qu’à détester ceux que j’aime.

Cette lettre annonce définitivement que ton choix s'est arrêté. Tu vas là bas pour ne pas rentrer.